Analyse de discours et demande sociale : enjeux théoriques et méthodologiques

Les sciences humaines et sociales ont toutes en filigrane l'objectif d'expliquer une parcelle plus ou moins vaste du monde dans lequel des individus, des groupes et des sociétés évoluent. Mais expliquer à qui? Voilà la question centrale de ce colloque, question qui se pose d'une part parce que, phénomène relativement récent, la société attend des retombées de la recherche qu'elle soutient, et d'autre part parce que les universitaires revendiquent la reconnaissance de leur expertise dans l'espace public. Dans ce contexte, se pose l'inévitable question de l'utilité de la recherche sociale, qui génère celle, éthique, de la tension entre l'objectivité du chercheur et la subjectivité du citoyen.
Mes expériences et expertises m'amènent à décliner en trois types la recherche-action (recherche d'intervention ou autre appellatif) en analyse de discours :
1) l'analyse de discours comme levier d'une implication citoyenne : comprendre le monde pour agir dans la société;
2) l'analyse du discours comme contribution à la recherche transdisciplinaire : apporter une expertise particulière à un problème de recherche;
3) l'analyse de discours comme argument appuyant un problème ponctuel : répondre à une question formulée par des intervenants sociaux ou par des citoyens.
Les postures de recherche spécifiques qui gouvernent ces trois types d'intervention sur les plans conceptuel et méthodologique ne sont pas fondamentalement différentes de celles qui guident la recherche fondamentale; ce qui varie, c'est le contexte dans lequel s'est déployée la recherche (initiative personnelle, réponse à un appel d'offre, commande…), ainsi que l'obligation d'adapter la présentation des résultats en fonction de l'interlocuteur et de l'impact souhaité. Autrement dit, en contexte d'une recherche-action, l'effort de vulgarisation est gouverné par les enjeux sociaux de la réception des résultats.
Ces trois types de recherche seront illustrés par des expériences d'intervention découlant respectivement de l'analyse du discours radiophonique extrême, de l'analyse du discours populaire sur la dépression post-natale et de l'analyse du discours sur l'évolution des relations de couple.