Entrée de l'apprenant alternant dans le monde du travail : analyse d'interactions en situation de formation professionnelle initiale
 
Le passage de l'école au monde du travail est porteur de nombreux enjeux tant au niveau sociétal qu'au niveau de l'individu cherchant à s'insérer dans la vie professionnelle. La formation professionnelle initiale est une voie d'orientation fréquente censée encadrer le jeune en transition et le préparer à son entrée dans le monde professionnel. Dans ce contexte, le dispositif de formation de type dual, tel qu'il est cours en Suisse, propose de juxtaposer des périodes d'enseignement à l'école et des périodes de travail en entreprise. Il correspond souvent au premier contact du jeune avec le monde du travail. Cette première confrontation est préoccupante : accès parfois difficile à la formation professionnelle (offre insuffisante de places d'apprentissage dans certains secteurs), trajectoires de formation à certains égards problématiques chez les apprenants (taux élevé d'échec aux examens, fréquence des logiques d'orientation non linéaires, des ruptures de contrat d'apprentissage et des réorientations).
Dans notre recherche, qui se caractérise par une démarche propre à l'analyse du discours et qui se rattache aux travaux du groupe LAF (Filliettaz & Bronckart, 2005), nous proposons de traiter la problématique de la transition de l'école au monde du travail à travers l'analyse de situations de formation authentiques et plus précisément des interactions dans lesquelles les apprenants s'engagent avec les différents acteurs de la formation professionnelle. Pour ce faire, nous avons recours à des données audio-visuelles recueillies dans les contextes de l'école et de l'entreprise, qui documentent des pratiques réelles de formation. Dans notre contribution, nous présenterons l'analyse d'une séquence en centre de formation en tentant de dégager les trajectoires de participation (de Saint-Georges, 2008) de différents apprenants, monteurs-électriciens, à une tâche spécifique. En nous appuyant sur des concepts théoriques et des outils méthodologiques, notamment les notions de places et de rôles, issus de la sociolinguistique interactionnelle (Goffman, 1973 ; Zimmermann, 1998), nous étudierons les différentes modalités de participation des apprenants à l'activité, les rôles et les places qui leur sont proposés et qu'ils occupent ainsi que leur possible progression. Nous nous appliquerons à montrer comment les modalités d'encadrement de l'enseignant contribuent à configurer la participation des apprenants. Ce faisant, nous questionnerons le dispositif de type dual, ici dans son versant scolaire, en nous demandant comment il accompagne la période de transition que vit l'apprenant, et comment il favorise ou non les processus d'apprentissage et de socialisation professionnelle que nous considérons comme des dimensions importantes des transitions socioprofessionnelles.
Finalement, dans une perspective plus générale, notre présentation adressera la question de la demande sociale en ce qu'elle est rattachée à un projet de recherche qui n'a pas fait l'objet d'une demande institutionnalisée. Notre questionnement portera ainsi sur la possibilité de faire dialoguer l'analyse du discours et la pratique sociale dans laquelle est ancré son objet d'étude.
Bibliographie
Filliettaz, L. & Bronckart, J.-P. (Ed.). (2005). L'analyse des actions et des discours en situation de travail. Concepts, méthodes et applications. Louvain : Peeters
Goffman, E. (1973). La mise en scène de la vie quotidienne. La présentation de soi. Paris : Minuit.
de Saint-Georges, I. (2008). Les trajectoires situées d'apprentissage. In L. Filliettaz, I. de Saint-Georges & B. Duc, " Vos mains sont intelligentes ! " : interactions en formation professionnelle initiale. Université de Genève : Cahiers de la Section des Sciences de l'éducation.
Zimmermann, D. H. (1998). Identity, context and interaction. In C. Antaki & S. Widdicombe (Ed.), Identities in talk (pp. 87-106). Londres: Sage.