La situation paradoxale des sciences du langage au regard de la demande sociale
 
La question de la demande sociale a été largement problématisée dans les disciplines des SHS qui y ont été directement et depuis longtemps confrontées, essentiellement la sociologie et l'économie. En sciences du langage et plus précisément en analyse de discours ou en sociolinguistique, cette question est plus récente, du moins formulée de la sorte.
Dans un premier temps, j'explorerai dans l'histoire le paradoxe de cette situation épistémologique. En effet, les fondateurs de la linguistique générale en France comme A. Meillet et M. Cohen considéraient la linguistique comme une branche de la sociologie, à l'instar de leur collègue Durkheim : force est de constater que les développements ultérieurs de cette discipline l'en ont largement éloignée jusqu'à ce que, de nombreuses décennies plus tard, des domaines comme la sociolinguistique et l'analyse de discours (dans le courant des années 60-70) repensent théoriquement et méthodologiquement les liens avec le social, la sociologie et soient confrontés à la problématique de la " demande sociale ".
Dans un deuxième temps, à partir de mon expérience longue de linguiste du domaine Langage et travail, je défendrai à la suite de P. Bourdieu et de M. Heller l'importance d'un point de vue " critique " lorsqu'on s'engage dans des travaux en prise directe avec des demandes émanant d'acteurs sociaux comme les entreprises, les syndicats, les Ministères ou les collectivités territoriales.