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Transdisciplinarité dans l'analyse des discours
médiatiques
Nous nous situons dans une
Analyse du discours qui assume la difficulté à saisir où commence la demande
sociale. La demande sociale est quelquefois non institutionnalisée, non
explicite, mais elle peut pourtant être pressentie par le chercheur sous forme
d'une exigence éthique. La demande sociale est alors appréciée a posteriori.
C'est le cas, nous semble-t-il, de l'analyse des discours médiatiques qui, en
quelque sorte, précéderait la demande sociale et également de la Critical
Discourse Analysis qui se pose comme partie intégrante de " l'analyse sociale
des changements socioculturels " et des discours tenus dans une société donnée
(Fairclough 1995). Cette exigence éthique et scientifique est alors de "
contribue(r) à une œuvre de clarté " (Weber 1959).
Notre travail est
clairement tendu vers cette exigence éthique et sociale en ce qu'il analyse la
représentation idéologique et consensuelle que les médias proposent des conflits
sociaux et en ce qu'il vise à montrer comment l'effet d'évidence de cette forme
de présentation naturalise le discours néolibéral et comment, en tant que
discours constituant (Maingueneau & Cossutta 1995), ce discours tente
d'imposer une vision du monde à l'ensemble de la collectivité.
D'emblée,
l'analyse de la forme évidente de ce discours constituant pose et suggère des
questionnements et des choix méthodologiques. À commencer par la constitution de
notre corpus composé dans une perspective contrastive afin de réduire le "
risque épistémologique " (Von Münchow 2004). Celui-ci comporte 184 articles de
commentaires (éditoriaux et chroniques) de la presse généraliste française
publiés lors de deux " crises sociales ", de deux " moments discursifs "
(Moirand 2002) : novembre-décembre 1995 et mai-juin 2003. Ces deux " mouvements
sociaux " ont été choisis pour leur comparabilité thématique (réformes des
retraites des fonctionnaires) tandis que le genre article de commentaire en tant
que " discours-limite de transmission des connaissances " (Beacco & Moirand
1995) forme " l'invariant de la comparaison " (Von Münchow 2004 : 41).
Pourtant, si le genre choisi relève d'un groupe représentatif - les "
dirigeants éditoriaux d'un journal " - appartenant à une communauté discursive
(les médias), l'objectif est d'étudier un type de discours (les discours
constituants) qui dépasse largement les frontières du genre en question. La
prise en compte du contexte socio-historique, qui renvoie aux données
configurées par les découpages de la société - dont le découpage en disciplines
scientifiques " autonomes " -, s'avère donc indispensable et nécessite une
approche pluri- et transdisciplinaire. En effet, la transdisciplinarité permet
de dépasser ce découpage sans pour autant abolir les frontières indispensables
au fonctionnement des disciplines (Darbellay 2005).
Nous montrerons, en nous
appuyant sur des énoncés tirés de notre corpus, comment une recherche
extradiscursive transdisciplinaire, en amont du travail d'analyse, est
souhaitable puisqu'elle induit une approche méthodologique intradiscursive
et interdisciplinaire. Ainsi, afin d'enrichir d'une part la connaissance des
enjeux sociohistoriques et, d'autre part, la réflexion théorique (les concepts
d'idéologie, d'évidence, de doxa, d'opinion…), on a puisé respectivement à la
sociologie des médias et à la sociologie politique, et à la sociologie de la
communication et à la philosophie du langage. Ces apports enrichissent
considérablement l'analyse qui cherche à comprendre l'implicite de l'évidence et
de la naturalisation grâce aux niveaux énonciatifs, pragmatiques,
communicationnels, rhétorico-argumentatifs et quantitatifs. Ces approches
multiples ne forment pas un éclectisme mais sont conçus comme des regards
différents et complémentaires sur l'objet complexe qu'est le discours. Le
discours n'est plus pensé dans sa clôture mais dans son hétérogénéité, dans sa
nature à la fois textuelle et sociale (Darbellay 2005 : 94-95). L'objet analysé
a ainsi un impact sur la méthodologie du chercheur qui doit " apprendre à
articuler les points de vue disjoints du savoir en un cycle actif " (Morin 1977
: 19).
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bibliographiques
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