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Elio BALLARDINI
Université de
Bologne Haute Ecole de Langues Modernes pour Interprètes et
Traducteurs de Forlì elio.ballardini@unibo.it
Interpréter et traduire au procès pénal : Construction
d'un " événement "
Ma communication s'interroge sur le rôle que revêt
l'interprète-traducteur lors d'un procès pénal plurilingue, envisagé comme un
événement codifié, ritualisé et contraignant. Deux dimensions sont examinées :
celle des dynamiques internes au procès et celle de la logique externe au
procès, d'ordre référentielle. Premier niveau d'analyse : lorsque les
différences d'identités et de cultures, de langues et de langages empêchent le
bon déroulement d'un procès, notamment quand l'accusé ne comprend pas ou ne
parle pas la langue officielle de la procédure, l'intervention d'un
interprète-traducteur est requise, selon les principes du procès équitable. Son
entremise permet au justiciable de participer au procès et d'assurer sa défense,
et constitue en soi un événement qui modifie la manière habituelle de conduire
un procès monolingue. En ce sens, l'intreprète-traducteur permet de rétablir
l'égalité des armes entre les parties, fonction tout particulièrement importante
lors des débats à l'audience, où l'interaction entre des formes énonciatives
multiples - codes verbaux et non verbaux, langage spécialisé et commun, oral et
écrit, discours monologique et dialogique, le rapport asymétrique entre les
divers acteurs qui prennent part au procès, la représentation des faits et la
reconstruction de la vérité judiciaire - sont à la base du caractère
contradictoire de la procédure. Deuxième niveau d'analyse :
l'interprète-traducteur assure la publicité de l'audience (sauf huis
clos), aspect dont l'importance dépasse parfois celle de la recherche de la
vérité judiciaire. C'est le cas, entre autre, des grands procès conduits dans le
sillage de l'expérience de Nuremberg, dont la finalité plus ou moins déclarée
est de rétablir une vérité historique et de poser les assises d'une mémoire
partagée. Ici, la publicité des débats peut être amplifiée par une couverture
médiatique, qui devient un moyen de circulation de connaissances historiques et
de notions juridiques capables de façonner la vision que nous avons du passé. La
traduction permet ainsi une reconstruction des faits qui répond à l'exigence
sociale de révéler des actes accomplis et des événements survenus à un moment
donné de l'histoire. L'objectif de notre communication est d'apporter aux
réflexions sur la traduction et l'interprétation au tribunal pénal une
perspective interdisciplinaire nouvelle qui tienne compte de la complexité du
contexte communicatif examiné.
Mots clés : événement, mémoire historique,
procès pénal, publicité, traduction
Ballardini E. 2010. " Traduire devant un juge ", in Londei
D. & Callari Galli M., Traduire les savoirs, Peter Lang. Cornu G. 1980.
Linguistique juridique, Paris, Montchrestien. Driesen, C. 1990. "
L'interprète judiciaire face aux obstacles, ratés et échecs de la communication
au pénal ", in Lederer, M. (ed.) Etudes traductologiques en hommage à Danica
Seleskovitch, Paris, Minard, Lettres Modernes, 243-253. Robin C., 2000. La
langue du procès. Les Presses Universitaires de la Faculté de Droit de
Clermont-Ferrand. Skuncke, M.-F. 1989. "Tout a commencé à Nuremberg",
Parallèles, Université de Genève, 11, 5-8.
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